Migrateur transsaharien, le Phragmite aquatique, Acrocephalus paludicola, est une fauvette paludicole qui niche dans les marais des zones tempérées européennes (Pologne, Allemagne, Lituanie, Ukraine, Biélorussie) et hivernant dans les zones humides ouest africaines.
Aujourd’hui, le Phragmite aquatique est mondialement menacé et c’est le seul passereau européen dans ce cas. Il est inscrit comme espèce « vulnérable » sur la liste rouge mondiale de l’UICN (BirdLife International, 2004). Le phragmite aquatique a vu son aire de distribution se réduire considérablement au XX eme siècle sous la pression des activités anthropiques et notamment de la profonde transformation des modes agricoles. En Europe de l’est, environ 80% de la population reproductrice (11 000 à 16 000 mâles chanteurs) se situent entre la Pologne, la Biélorussie et l’Ukraine sur une quarantaine de sites (Flade & Lachmann, 2008). Il a disparu de France en tant que nicheur et plus récemment c’est la Hongrie qui a vu l’espèce disparaitre en tant que nicheur. Aujourd’hui l’espèce fréquente l’hexagone uniquement en période de migrations.
D’une taille de 13 cm pour une masse moyenne de 12 g, il est de couleur brune. Les deux sexes ont le même plumage. Il se différencie du Phragmite des joncs Acrocephalus schoenobaenus par sa raie sommitale jaune, les nettes bretelles chamois encadrant le manteau, les fines rayures noires sur les flancs et ses pattes couleur chaire. Ses rectrices pointues contrastent avec celles de son cousin plus arrondies (Demongin, 2013 ; Svensson, 2010 ; Géroudet, 1973).
Le Phragmite aquatique est un insectivore migrateur transsaharien qui migre de juillet à octobre vers l’Afrique de l’Ouest. Il réalise une migration en deux temps. Le schéma classique, validé par la communauté scientifique, met en avant un flux qui part de l’Europe continentale vers la façade maritime de l’Europe du nord ouest. C’est là que la migration devient Nord sud pour rejoindre les quartiers d’hivernage en Afrique de l’Ouest. A cette occasion, la France joue le rôle de carrefour et accueillerait la majeure partie de la population mondiale au cours de l’été (Julliard et al., 2006 ; Jiguet et al., 2011). Il niche aujourd’hui à l’est du continent européen et rejoint ensuite ses quartiers d’hivernage d’Afrique de l’Ouest en passant par l’Europe de l’Ouest (Fig. 1).
Le Phragmite aquatique est un passereau extrêmement exigent en termes d’habitat en particulier lors de la reproduction : milieux ouverts, humides et plutôt bas. Il délaisse les roselières et les zones avec des arbres. Il apprécie les prairies hygrophiles, les parvo-roselières, les magnocarocaies, les scirpaies etc.
Ses facultés de déplacement intermédiaires entre la marche des fauvettes du genre Locustella et le vol des fauvettes du genre Acrocephalus, lui ont permis d’utiliser une niche écologique peu utilisée par d’autres espèces de passereaux paludicoles. L’existence de ces habitats dépendent aujourd’hui presque exclusivement des actions de gestion par l’Homme. En migration, il va rechercher des milieux similaires à ceux qu’il fréquente lors de la saison de reproduction mais peut se montrer un peu plus souple. Les habitats qu’ils occupent sur les sites d’hivernage ressemblent davantage à ceux occupés lors de la reproduction.
En période de nidification, le mâle occupe un territoire de 2 à 8 ha (Dyrcz et al., 2018). La femelle s’occupe seule de la construction du nid, de la couvaison (14 jours) et de l’élevage des jeunes (13-14 jours). Elle dépose trois à six œufs fécondés par un ou plusieurs mâles, dans un nid posé sur une touffe d’herbe ou sur un enchevêtrement de végétaux. L’espèce fait deux pontes par an. Ce mode d’élevage monoparental nécessite donc d’avoir des habitats très riches en insectes. Elle s’est ainsi spécialisée sur les marais tourbeux gorgés d’eau et riches en ressources alimentaires (mésotrophes à eutrophes).
Insectivore stricte, le Phragmite aquatique se nourrit de divers arthropodes : orthoptères, diptères, araignées, trichoptères, odonates etc. Son régime alimentaire est constitué de proies plus grosses que celles consommées par ses autres cousines fauvettes paludicoles (Provost et al. 2011, Marquet et al. 2014, Musseau 2014).